« Fontaine de Grâce », une ONG d’Abidjan pour la veuve et l’orphelin

Fondée en 1999, cette ONG confessionnelle et francophone travaille, en milieu pentecôtiste, pour secourir et accompagner les veuves et les orphelins.

 

Vues depuis l’Europe, les questions sociales africaines et l’enjeu de la lutte contre la pauvreté sont souvent envisagées sous le prisme des grandes ONGs internationales, ou de l’aide au développement mis en œuvre par les Etats. Ce biais médiatique s’associe souvent à un complexe, désigné en anglais par l’expression : « White Savior Complex », le « complexe du sauveur blanc » (1). Cette expression renvoie à une structuration de l’imaginaire articulée autour du stéréotype suivant : la victime à aider est noire, africaine. L’organisation qui lui vient en aide est tenue par des Blancs, d’Europe ou d’Amérique. Le stéréotype correspond à une part de réalité, liée à l’histoire de la colonisation, aux relations asymétriques qui en ont découlé, et aux déséquilibres économiques persistants entre le Nord et le Sud.

Mais ce « complexe du sauveur blanc » oblitère l’essentiel : le fait que l’enjeu de la pauvreté en Afrique est avant tout géré, pays par pays, par les intéressés, via l’action politique, l’engagement sur le terrain des Églises et acteurs religieux, et les initiatives de nombreuses ONGs africaines locales (2).

En Côte d’Ivoire, ces associations et organisations de terrain à vocation de solidarité se déploient sur tous les fronts, et irriguent la société civile. La plupart du temps, elles s’ancrent dans un contexte religieux, porteur de valeurs et d’un habitus militant tourné vers le service de la communauté.

C’est le cas de l’ONG chrétienne ivoirienne et ouest-africaine Fontaine de Grâce Internationale, dirigée par Suzanne Coulibaly Nielbien. Fondée en 1999, cette ONG confessionnelle et francophone travaille, en milieu pentecôtiste, pour secourir et accompagner les veuves et les orphelins.

La question des veuves, en Afrique de l’Ouest francophone, est ultrasensible. Les veuves sont souvent « spoliées et mises au ban de la société », parfois accusées de sorcellerie, comme l’a décrit notamment Martin Mateso (France Télévisions, France Info) dans une enquête sans concessions (3).

En décembre 2022, à l’occasion d’une visite des locaux de sa permanence sur le Boulevard des martyrs, dans le quartier de Cocody (Abidjan), Sylvain, un bénévole de cette ONG Fontaine de Grâce tournée vers le service des veuves, nous en dit plus.

Pouvez-vous vous présenter ?

Bonjour, je suis bénévole pour Fontaine de Grâce Internationale, je m’occupe de l’accueil. Je tiens la permanence. Bienvenue à vous. Nous sommes ici à Cocody (Abidjan). Nos locaux sont ouverts à tous. Fontaine de Grâce, c’est une ONG principalement ivoirienne, mais nous avons aussi du soutien à l’international. Nous œuvrons localement, auprès de celles qui ont besoin, nous sommes soutenus ici par celles et ceux qui ont à cœur d’aider.

Pourquoi « Fontaine de Grâce » ? Quel est l’objectif ?

Ma responsable (Suzanne Coulibaly Nielbien ndlr) le dirait mieux que moi. Je vous invite aussi à consulter notre page Facebook où nous présentons nos activités. L’objectif est de venir en aide aux veuves et orphelins. Nous nous appelons Fontaine de Grâce à cause de l’Évangile. La grâce de Dieu apporte des solutions à notre soif, notre faim. C’est comme une fontaine abondante. Elle donne, elle est généreuse. Notre but est avant tout d’apporter un secours aux orphelins et aux veuves que nous connaissons dans les Assemblées de Dieu (pentecôtistes). Les veuves sont nombreuses dans les ADD. Elles manquent souvent de soutien pour pouvoir vivre comme il faut. Les difficultés sont grandes, pour elles. Notre ONG porte son attention sur ces personnes vulnérables pour qu’elles ressentent qu’elles ont de la valeur, et qu’elles aient de quoi s’en sortir. Fontaine de Grâce travaille en lien étroit avec les Églises Assemblées De Dieu (ADD). La Bible nous rappelle qu’il faut honorer les veuves (1 Timothée 5, 13 ; Jacques 1, 27). Les orphelins aussi. C’est un commandement du Seigneur.

Quelles activités concrètes mettez-vous en œuvre ?

Nous organisons différentes choses. Par exemple, des distributions alimentaires, ou des repas gratuits pour les veuves et les orphelins. L’idée est aussi d’éviter l’isolement. Nous avons de temps en temps des événements de levée de fond, où des prédicateurs viennent donner une exhortation, ou faire un concert avec des chantres invités, afin d’encourager les donateurs à soutenir l’œuvre. Chaque année, nous organisons aussi un arbre de Noël à la fin du mois de décembre, avec distribution de cadeaux pour les enfants. Nous décorons nos locaux, installons un sapin de Noël, organisons la venue d’un Père Noël, bien déguisé, pour les « orphelins et enfants de la rue ». Ces rendez-vous sont appréciés, nous les préparons soigneusement. Nous apprécions le soutien que l’on peut recevoir afin que tout cela soit possible. Venez le dimanche, vous en saurez plus !

(1) Lire notamment : Kathryn Mathers, White Saviorism and Popular Culture : Imagined Africa as a space for American Salvation, Taylor and Francis, 2022
(2) Sur le rôle des ONGs africaines en milieu revivaliste, lire notamment Géraldine Mossière, dans Marie Nathalie LeBlanc et al., Canadian Journal of Development Studies/Revue canadienne d’études du développement, Vol 34, 2013 – N°2, « Religion and International Development / La religion et le développement international » p.254-274
(3) Martin Mateso, « La détresse des veuves en Afrique : spoliées et mises au ban de la société, site https://www.francetvinfo.fr/, 7 juillet 2017